Comme hier le
petit-déjeuner est savouré chez Nero. La table ronde sur le trottoir est
abritée par une avancée de la toiture du bâtiment qui abrite le café. Le ciel
est en nuances de gris et une pluie fine intermittente se déverse sur Londres.
Certains passants sont munis de parapluie, d’autres bravent l’intempérie
estivale. Une jeune femme se protège le dessus de la tête avec un magazine.
Chacun vaque à son occupation du moment indépendamment de la météo. Une bonne
partie de la matinée est consacrée à l’écriture et à l’actualisation du blog. A
midi nous marchons sur High Holborn. Une pluie fine tombe par alternance et les
parapluies prêtés par le Citadines s’ouvrent et se ferment au gré des vannes du
ciel. High Holborn prend le nom de Holborn Viaduc au niveau du pont éponyme qui
enjambe la rue Farringdon Street. Depuis le viaduc, inauguré en grandes pompes
en 1860 par la Reine Victoria après six années de travaux, je prends en photo
un vaste chantier en contrebas. Des dizaines d’ouvriers en gilet jaune, aux bras et aux mains laborieux,
telles des fourmis précises et efficaces, façonnent le visage de la cité. Au
premier plan du cliché, une tête de dragon, une des multiples statues et
sculptures figuratives et allégoriques ornant le Holborn Viaduc, semble veiller
farouchement sur le site en construction. A une courte distance du pont nous
passons devant le restaurant « Sūppa » qui propose des soupes saines
pour la santé. Nous entrons pour déjeuner. Lala, une jeune femme souriante
de la région parisienne, nous accueille et nous conseille en français. Nous
nous attablons derrière le vitrage à la tablette deux places à droite de
l’entrée dans le dessein de voir défiler les passants et le trafic routier. Je
savoure une crème de champignons. Patrick opte pour une soupe épicée à la courge
butternut. Du riz brun a été ajouté aux potages grâce à Lala. Deux sandwichs
végétariens « Stilton » complètent notre repas. Le mouvement de la vie offre de
voir une voiture de police escortée de deux vélos s’arrêter sur le terre-plein
central entre les voies. Les quatre agents contrôlent les voitures
particulières ; les taxis et les véhicules professionnels sont dispensés
d’un arrêt. Patrick voit là une manière de soulager les porte-monnaie des
conducteurs. Un restaurant italien est présent de l’autre côté de la chaussée.
Quand le passant dispose de quelque argent dans sa poche, il est impossible de
mourir de faim tant le nombre d’endroits pour se restaurer est important dans
Londres. Nous saluons Lala, je prends une photo de la devanture de « Sūppa »
et nous continuons notre chemin. Plus loin, nous prenons à droite dans
« Old Bailey ». Sur la gauche de la rue, la façade du building de la banque japonaise d'investissement « Mizuho »
retient l’attention. Des lames verticales colorées étoffent les façades de leur
nuance et confèrent un mouvement ondulatoire à la forme arrondie du bâtiment.
Nous suivons ensuite Ludgate Hill et nous passons devant le vaste édifice de l’église
St Paul. Ensuite, tour à tour, nous marchons dans Godliman street, Queen
Victoria street et Peter’s Hill, une rue qui permet d’accéder au pont
piétonnier « Millenium Bridge ». Un ascenseur funiculaire permet d’accéder
en contrebas au bord de la Tamise. Le vent souffre fortement sur le fleuve et
je ferme le parapluie malgré la pluie pour éviter à la toile de se retourner.
Nous arrivons au « Tate Modern » distant de quelques mètres du pont. Il a pris
place dans l'ancienne centrale électrique de Bankside conçue par Sir Giles Gilbert Scott et construite
en deux phases entre 1947 et 1963. Après six années de travaux conséquents, le
musée fut inauguré par la Reine le vendredi 12 mai 2000. Il regroupe les
collections nationales d'art moderne et contemporain issues de la Tate Gallery.
La centrale, dépouillée de ses organes, est devenue une immense coquille vide
où des galeries ont pris place. Nous découvrons les œuvres du quatrième étage
sur les sept niveaux accessibles. Malgré les nombreux agencements, l’immensité
du lieu demeure et les proportions me semblent inadaptées pour abriter un musée
malgré le succès immédiat. Une information recueillie sur le site www.tate.org.uk annonce plus de quarante
millions de visiteurs à ce jour. Certaines œuvres retiennent mon attention,
toutefois j’éprouve une sorte de trouble dissonant dans le site en rupture d’harmonie
avec l’art selon mon ressenti. Celles d’un artiste allemand furent un défi puissant
et courageux à la propagande nazie bien avant la seconde guerre mondiale. Lors
de la première guerre mondiale, Helmut Herzfeld pris le nom de John Heartfield pour
protester contre le nationalisme rampant en Allemagne. Une œuvre de Barbara
Kruger m’interpelle. Une main ouverte tenant un cube allongé entre le pouce et
l’index montre une des faces ; les mots écrits en lettres majuscules blanches
sur fond rouge « Who owns what ? » « Qui possède quoi ? »
questionnent avec le point d’interrogation final. Barbara, arrivée sur Terre en
1945, interroge tout un chacun et lance un défi à la société de consommation. Le
commentaire sur la photo ajoute que la richesse est concentrée dans moins en
moins de mains. Après plus d’une heure dans le musée nous empruntons à nouveau
le pont Millenium. La pluie s’accentue quand nous arrivons au Café Rouge repéré
précédemment devant St Paul. La brasserie aux accents et à la décoration
françaises se dévoile. Zuza, la chevelure rousse, originaire de Pologne, est
notre hôtesse pour ce temps de détente. Nous optons pour une offre à 4,95£ incluant
une boisson chaude aux choix et une pâtisserie. Patrick sirote un cappuccino
avec une part de « Red Velvet ». Je choisis un Mocha et une part de
gâteau au chocolat dont la saveur disconvient à mes papilles gustatives ;
elle décorera la table en marbre blanc chiné noir. Les minutes passent
agréablement tout comme les bus rouges qui défilent sans discontinuer devant le
café sur Saint Paul's Churchyard. La musique diffusée, peut-être celle du
groupe Pink Martini formé
en 1994 par le pianiste Thomas Lauderdale à Portland dans l’Oregon, couvre de
temps à autre le brouhaha des conversations et le souffle du vent qui s’engouffre
dans le café par la porte à double battants qui rechigne à rester fermée. Les
toilettes sont situées dans les entrailles du café. Il convient pour y accéder
de descendre trois paliers. Des photos anciennes de Paris et des cartes
postales francophones du passé sont exposées aux murs dans la descente. Je
photographie la carte envoyée de Paris par Marthe au Québec voici fort longtemps
au regard des mots écrits à la plume et celle de la cousine de Virginie écrite
le 28 avril 1908. Malgré le cadre agréable et le service attentif de Zuza, nous
quittons le café à cause du vent froid qui s’invite trop souvent. La pluie et
le vent ont redoublé de vigueur. Des toiles de parapluies se retournent. Une
centaine de mètres plus loin, nous arrivons quelque peu mouillés au restaurant français
« Cojean » sur Ludgate
Hill malgré les parapluies, tantôt ouverts tantôt fermés en raison du vent. La
salle est lumineuse et le mobilier moderne. Les façades entièrement vitrées offrent
aux regards de suivre la vie en mouvement dans la rue. Geneviève, une française
de Paris, est notre hôtesse. La société Cojean, fondée en 2001 à Paris, où une
vingtaine de restaurants sont présents, propose une nourriture inspirante pour
le corps et l’esprit. Nous commandons deux smoothies : « Organic
secret garden » fraise, banane, kiwi et pomme et « Organic Middle
summer’s spring » ananas fraise pomme. Je croque quelques biscuits au
beurre salé en savourant à la paille le mélange onctueux. Des photos de la rue
sont prises depuis la banquette d’angle bleu ciel où nous sommes installés. Nous
feuilletons des magazines dont un en français « Ici Londres ». Nous apprenons
que le Duc de Westminster est mort brusquement récemment. Son fils Hugh, âgé de
vingt-cinq ans, devient duc à sa place. Une heure s’écoule et nous saluons
Geneviève en sortant vers dix-sept heures trente. La pluie a cessé. Nous retournons
tranquillement au Citadines. Nous passons devant le « Starbucks Fleet Place »
le long de Holborn Viaduc. Nous entrons brièvement pour photographier un
collage lumineux représentant un oiseau qui vole. Parvenus à la résidence après
un crochet dans un Ryman nous constatons la présence d’un supermarché « Little
Waitrose », absent de notre vision les jours précédents. Nous entrons pour
effectuer des courses pour dîner dans le studio. Une soupe carotte et courge butternut
savourée avec des noisettes, des amandes et des noix composent mon repas. La
société familiale « Yorkshire Provender », créatrice de la recette de la soupe,
fut fondée par Belinda et Terry Williams qui se rencontrèrent lors d'un voyage dans
la forêt tropicale australienne. Patrick déguste une salade de pomme de terre
et croque des arachides. La soirée se déroule dans le confort du studio avant
de répondre favorablement à l’appel de Morphée…
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