Les rites
matinaux laissent place au petit-déjeuner savouré vers huit heures au buffet du
pont sept. Des noix de cajou sont présentes. Nous nous installons dans un bow-window.
La vue au travers des vitrages des trois pans coupés offre de voir défiler les voyageurs ;
certains marchent nonchalamment, d’autres ont le pas rapide et d’autres slaloment
entre les autres passagers en effectuant leur jogging. Un temps d’écriture
succède au repas matinal. Une famille s’installe à la table centrale
voisine ; l’adolescent en short de seize ans à peine dévoile des jambes entièrement
couvertes de poils noirs ; surprenant pour son âge. Un avion passe dans le
ciel et semble faire un demi-tour à la proue du navire. Patrick termine la
lecture du livre de Tahar Ben Jelloun et se rend à la bibliothèque pour en
choisir un autre. Il revient avec le roman d’Eric-Emmanuel Schmitt « La
nuit de feu ». Les dix heures quinze passent et j’éteins l’ordinateur. Le
ciel est grand bleu et les vagues argentées ondulent légèrement en scintillant
sous les rayons solaires. Nous marchons tour à tour sur la promenade du pont
sept et au soleil sur le pont douze où je prends quelques photos. Sur ce
dernier pont un espace est réservé aux chiens et à leurs propriétaires.
J’aperçois au travers d’un vitrage un caniche blanc habillé en rose. D’autres
chiens prennent l’air à l’extérieur sur la courte partie du pont qui leur est
octroyée. A midi nous déjeunons au buffet. Une paëlla aux légumes et du chou
rouge en salade sont savourés. Après le repas je m’offre un temps de lecture
avec Eldeflar. Patrick effectue une sieste. En début d’après-midi nous
assistons au théâtre à une commémoration de la mort de Shakespeare survenue
voici quatre cents ans. Les artistes de Rada, de la « Royal Academy of
Dramatic Art », se produisent sur scène. Ils présentent un condensé de
célèbres scènes de la mort imaginée par Shakespeare. Chants, expressions
corporelles, duels et danses étoffent le jeu des comédiens très à l’aise dans
les divers rôles qui se succèdent durant une soixantaine de minutes. A l’issue
de la représentation nous nous rendons au « Queens Room » pour le
traditionnel thé anglais de l’après-midi. La harpiste Magdalena Reising joue
pour les passagers séduits par la légendaire cérémonie. Nous sirotons du thé
tout en savourant un petit gâteau au chocolat suivi d’un scone tartiné de
beurre fouetté et nappé de confiture de fraise. La salle est pleine. Je prends
quelques photos. Des passagers en attente guettent les tables qui se libèrent
comme celle à notre droite où une famille de six personnes succède à un couple
autour de la petite table ronde. Le serveur en livrée et gants blancs parvient
à disposer toutes les tasses sur le plateau ; toutefois les coupelles à
douceurs sont posées sur les genoux des participants à la cérémonie. Le jeune
garçon de la grappe familiale opte pour la même douceur au chocolat que nous
avons fortement appréciée. Son regard captivé et ébloui suit attentivement le
geste mesuré du serveur. Il dépose sur sa soucoupe en porcelaine blanche la
douceur qui va enchanter ses papilles gustatives. L’attitude réservée de
l’enfant est empreinte d’un discret et merveilleux étonnement devant cet
événement quelque peu solennel. Nous laissons la famille à ces instants de
bien-être partagé pour nous rendre au Carinthia Lounge après un passage en
cabine. Nous nous installons dans un canapé trois places en tissu crème pour un
temps de détente. Je reprends la lecture de mon roman. Patrick retrouve
l’intrigue de la « La nuit de feu » d’Eric-Emmanuel. Le temps s’écoule sans
rien faire ; seule la magie des mots ravit nos esprits attentifs. Nous
revenons à la réalité du QM2 vers dix-huit heures trente. Nous allons diner au
buffet à une courte distance du lounge sur le même pont. Avant de nous asseoir
nous regardons ensemble les mets proposés. Nous optons pour du gratin de pomme
de terre et pour des champignons en sauce. Après le repas, nous enfilons en
cabine les tenues de gala. Cette seconde soirée formelle offre aux passagers
d’assister au Queens Room, où nous avons pris le thé, au cocktail de bienvenue
du commandant Christopher Wells et de ses officiers. Nous déclinons l’offre et
nous nous rendons au théâtre, en avance, pour être assis devant la scène. Un
temps de lecture avec Eldeflar précède le spectacle. Les chanteurs et les
danseurs de la troupe Royal Cunard nous entrainent dans les quartiers de New
York célèbres pour leurs théâtres. De Time Square à la quarante-deuxième rue, nous
pénétrons dans l’univers des années soixante avec la revue « Broadway
Roks ». Les paillettes, les plumes et les couleurs participent au show
mené tambour battant. L’interprétation de la chanson « Memory » de
Barbra Streisand me fait vibrer d’émotion. Tout comme le dimanche 15 mai, lors
de la traversée vers New York, j’apprécie d’entendre partiellement la chanson « Good Morning Baltimore » ; la
chanteuse apparait sur scène dans une méridienne rose qui monte des entrailles
du navire. Après le spectacle nous nous rendons au Carinthia Lounge. Patrick
sirote une infusion à la menthe. Assis sur le frère du canapé de l’après-midi,
nous écoutons les mélodies jouées au piano par Geza Torocsik. Patrick remarque
la présence d’un jeune homme aux cheveux longs, portant des lunettes, assis en face d’une dame
âgée. A l’issue de la prestation de l’artiste, nous retournons en cabine pour
entrer dans le royaume des rêves…
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