mercredi 3 août 2016

Escale à Falmouth sur l’île de la Jamaïque...


Le navire entre au port de Falmouth sur l’île de la Jamaïque à neuf heures quarante-cinq. Il glisse lentement sur l’eau pour se présenter à quai. Sa masse impressionnante donne la sensation qu’une colline vient provisoirement modifier le visage de la ville. Elle porte le nom de sa cousine  Falmouth, la ville portuaire à l'extrême sud des Cornouailles au Royaume-Uni qui vit naître Sir William Trelawny, le gouverneur de la Jamaïque. Il contribua à son développement avec le colonel Thomas Reid à l’origine des premières pierres en 1769. Pour la petite histoire Falmouth, méticuleusement planifiée dès sa naissance avec de larges rues et un approvisionnement en eau dans les bâtiments publics, bénéficia de l’eau courante dans la majorité de ses habitations avant celles de New York City… La matinée est consacrée essentiellement à la narration de la journée d’hier et à l’actualisation du blog. A midi nous déjeunons au buffet. C’est une sorte de jeu de piste parmi les divers îlots de nourriture pour détecter les mets végétariens. Je grappille des têtes d’asperges, des tranchettes de pomme de terre sautées, de la macédoine de dés de tomate, oignons et câpres, des petites têtes de brocoli, un dé de tofu… En dessert nous savourons du pudding tiède aux raisins avec de la crème anglaise. A une table voisine, un jeune enfant, accompagné de son père, regarde la « télévision » sur un petit ordinateur. Il est « scotché » sur l’écran par de probables dessins animés et, dans son émerveillement, il en oublie de manger. Patrick remarque un membre d’équipage qui nettoie méticuleusement une tâche sur une lame du plafond ; peut-être une giclée de ketchup… Après le repas, le blog est actualisé avec la page d’hier. Patrick profite de ce laps de temps pour s’offrir une petite sieste. Nous descendons ensuite à terre. Nous sommes pris en photo devant le panneau de bienvenue à Falmouth. Un complexe a vu le jour devant le navire qui obstrue l’horizon. Une tourelle en briques flanquée de quatre horloges noires et un galion échoué devant la demeure en brique du « Margaritaville Store », à l’entrée d’un Resort touristique du même nom, sont photographiés. En dessous de l’enseigne on peut lire « Live Life Like a Song » « Vit la vie comme une chanson ». Nous sortons rapidement de la zone touristique. Sur l’esplanade qui conduit à l’entrée de la paroisse de Trelawny je prends en photo quelques informations historiques encadrées sur des supports verticaux en bois foncé. Dans la paroisse, à la fin du dix-huitième siècle, près d’une centaine de plantations fabriquaient activement du sucre et de la mélasse. Ces denrées naviguaient vers le Royaume-Uni pour être transformées, notamment en rhum. Les bénéfices de la vente de sucre et de rhum servaient à acheter des biens manufacturés qui furent ensuite expédiés vers l'Afrique de l'Ouest pour être troqués contre des esclaves. Ces hommes et ces femmes asservis naviguèrent durant plusieurs semaines à fond de cale dans des conditions effroyables vers Falmouth. Les survivants furent vendus aux planteurs de sucre pour augmenter la production. Un cercle infernal pour l’être humain qui permit à la Jamaïque d’être le premier producteur de sucre au monde jusqu’en 1840 où cette année décisive vit l'émancipation des esclaves dans l'empire britannique. Nous déambulons dans les rues. Des maisons dévoilent leur charme ; certaines en décrépitude, oubliées, en côtoient d’autres en constructions dont une qui révèle des colonnes aux chapiteaux corinthiens sur les deux niveaux de sa façade brut de décoffrage. La couleur est au rendez-vous pour certaines. Les toitures en tôle, parfois colorées, sont dominantes dans le paysage urbain ; certaines sont rouillées. Un homme âgé s’active dans la rue devant un atelier à regarnir la carcasse d’un fauteuil aux larges accoudoirs en forme de crosse. La vue du capitonnage en mousse et de la suspension de l’assise emplit mon regard d’un brin de nostalgie. Nous laissons l’homme, tel le tapissier d’un temps jadis en Haute-Savoie, pour cheminer sur Cornwall Street. A l’angle avec Princess Street la garderie « Shermac Day Care », doublée d’un centre de soin préscolaire, attire l’attention. Patrick est pris en photo à l’angle des deux rues devant la bâtisse lambrissée pêche qui dévoile des figurines peintes dont une de Minnie, la compagne de Mickey. Devant le porche rehaussé de trois marches peintes en grenat, les lettres A-B-C et les chiffres 1-2-3 se laissent lire sur un muret assorti à la base en pierre bleu roi de l’édifice. Des photos sont prises, dont, pêle-mêle, une tourelle octogonale, une école pour enfant, le bureau de poste abrité dans un bâtiment jaune et blanc pourvu d’arcades, un kiosque dans un parc aménagé de bancs, une loggia à la rambarde à colonnade, une habitation ravagée par le feu, une maison blanche de caractère au volets à persiennes vert turquoise, une affiche pour des concerts estivaux dont l’un des tickets d’entrée oscille autour de mille dollars jamaïquain, soit quelques huit dollars US. Un marché local animé bat son plein au niveau de Market Street. Nous croisons seulement un couple du navire lors de ce périple au cœur des vieux quartiers. Les passagers sont sur les sentiers battus, en excursions, à bord du bateau ou dans l’espace mercantile sur les quais. Malgré un dépouillement relatif, défini ainsi au regard de la richesse visuelle occidentale, j’apprécie de flâner parmi les autochtones qui, pour la plupart, vaquent à leurs occupations journalières sans se préoccuper de nous. Un monsieur dort sous le porche de sa bicoque, la tête penchée sur sa poitrine. Les cafés sont animés sans la moindre présence étrangère. Par endroits, l’état accidenté de la chaussée et des trottoirs demande à rester vigilant. Après environ une heure trente de découverte, la forte chaleur nous incite à écourter notre pérégrination au travers des rues. En pénétrant dans l’enceinte du port, une agente de la sécurité demande à voir ma carte de cabine. Je prends conscience alors que seuls les passagers ont accès à la zone commerciale développée sur les quais autour du terminal de croisière. Une ombre qui obscurcit ma tendance à idéaliser les choses. Le contraste est net entre la pauvreté rudimentaire du centre historique et le visage clinquant du périmètre réservé aux passagers dont les installations coutèrent un peu moins de deux cents millions de dollars. Je suis chagriné par cette autre forme d’esclavage ; la liberté personnelle des citadins est dominée par des forces contraignantes extérieures. Nous nous installons dans la terrasse couverte du « Jabium Coffee » pour le siroter un mocaccino, une boisson chaude composée de café Jabium torréfié sur l’île, de lait et d’un ingrédient inconnu, le tout mélangé avec de la poudre de cacao. Je prends quelques photos du coffee étoffé de produits à vendre principalement à base du café de l’île. Une heure de détente s’envole lentement dans la chaleur équatoriale. Le vent rafraichissant du large vient agréablement nous chatouiller sans oublier de balader les détritus laissés par les passagers. Patrick propose d’aller découvrir la boutique consacrée à Bob Marley, l’enfant du pays né dans la paroisse de Saint Ann un jour de février 1945 qui fit découvrir au monde le reggae, un riche dérivé du blues. En chemin, je sirote du jus de coco acheté dans sa coque pour quatre dollars à un marchand ambulant. Après la visite du magasin, nous retournons tranquillement au navire. Nous passons devant la boutique « Tina’s Gift Shop » où j’achète une chemisette bleue décorée de motifs jamaïcains. Une fois dans la cabine Patrick me photographie avec la chemisette. La fin d’après-midi se poursuit à la bibliothèque du navire où nous jouons au « Hive ». Nous dinons au buffet. Une part de tarte à la crème et à la banane, agrémentée de cerises cuites en gelée et d’amandes effilées, termine le repas. La soirée nous offre d’assister à un spectacle sur glace au Studio B intitulé « Dragons sur glace ». Je pense au film « Eragon ». Quelques photos sont prises dans le mouvement continuel des artistes grimés sur la glace. Lors d’une balade sur le navire avant d’entrée au pays des rêves, nous estimons dans la galerie d’art au pont quatre le poids de l’œuvre « Sherlock » réalisée par Nano Lopez, une sculpture en bronze coloré d'un fox-terrier tenant une pipe dans sa gueule. Le gagnant remportera une œuvre…























































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